« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’Hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés.
La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.
La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Jamais cette réflexion d’Helder Camara n’a semblé aussi pertinente qu’aujourd’hui. Nous voyons la violence institutionnelle aux Etats-Unis où un président raciste envoie l’armée pour mater son propre peuple. En France, les pouvoirs publics restent sourds aux appels des plus pauvres depuis des mois (gilets jeunes) et aux réclamations des exploités (soignants dans les hôpitaux par exemple que l’on remercie avec des merdailles après tant d’abnégation de leur part). Ils répondent à tous ceux-là par des répressions policières, jamais vues jusqu’ici, avec une militarisation d’armes et de moyens (vidéos, drones…) de plus en plus sophistiquées.
Des brutalités injustifiables et la plupart du temps iunjustifiées
Et c’est ainsi dans bien des pays occidentaux où le libéralisme règne. Mais les pays autoritaires, dictatoriaux ne sont pas en reste (Russie, Brésil, Philippines, Arabie…). Un vent de violences plane sur le Monde.
Chez nous, est-ce le système libéral qu’ils veulent protéger et maintenir envers et contre tous ? Cela ressemble fort à un chant du cygne. Peut-être que cette fin inéluctable annonce-t-elle les derniers soubresauts d’un système à l’agonie ou alors nous nous trouvons vers un renforcement de la violence pour maintenir en place de manière autoritaire un système financier qui ne profite qu’à une infime minorité.
Plusieurs questions surgissent dont celles de la brutalité policière et de l’armée qui utilisent leurs forces sans état d’âme et sans réflexion. Le fruit d’un mode de formation dans leurs rangs ? Certains en profitent pour user abusivement de leur « autorité », pratiquement assurés de l’impunité quasi systématique de la part de leurs « maîtres ». Le cas Gorge Floyd asphyxié sous le genou d’un policier aux USA est assez emblématique : 18 plaintes contre l’officier assassin n’ont jamais abouties.
Nous retrouvons en France cette même impunité : combien de policiers ont été poursuivis après toutes les dizaines de dérapages (mains arrachées, éborgnages, etc. … ) ? Un seul à ma connaissance, tant son cas était flagrant !
Selon un sondage de ce mois de juin, 1 français sur 3 ne se sent pas en sécurité face à un policier. Et pendant ce temps-là, la seule préoccupation du sinistre de l’intérieur Castaner et de la direction de la police serait de garantir l’impunité face aux violences policières ? Les résidents des banlieues ont désormais peur des gardiens de l’ordre, mais pas qu’eux…
Jacques Toubon lui-même, défenseurs des droits, s’alarme de ces déploiements de répressions policières et parle de « discrimination systémique » vis-à-vis de ces « indésirables » pour lesquels des contrôles d’identité abusifs agrémentés de pratiques manifestement illégales sont exercés contre ces « bicots », « nègres » et autres citoyens à la peau foncée. (les noirs et les arabes ont 20 fois plus de risques d’être contrôlés en France) Discours qui va à rebours de celui, dominant, du Gouvernement.
Le Défenseur des droits demandait déjà il y a plus d’un an la suspension de l’usage des lanceurs de balle de défense ( LBD), en raison de la « dangerosité » de ces armes utilisées par les forces de l’ordre… en vain …
Même L’ONU s’est inquiété de dérives et des dérapages (du genre tabassages, matraquages) en France en 2019 et avait demandé une enquête approfondie … en vain…
Tous dans le même sac ?
Faut-il généraliser ? La tentation est grande de mettre dans le même sac tous les policiers et militaires. Quelques brebis galeuses seulement qui déshonorent ces corps d’état ? Les bavures sont si nombreuses et fréquentes qu’on a du mal à l’accepter. Le fait qu’en 2017 plus de 51 % des forces de l’ordre votaient à l’extrême-droite interroge…
Pourtant des gestes forts comme aux USA où de policiers et shérifs mettant un genou à terre pour se désolidariser des extrémistes racistes et violents mettent du baume au cœur et nous réconcilie avec ces « gardiens de la paix », heureux et fiers de leur travail au service de leur population. Même l’ancien ministre des armées US conteste son président « immature » et va-t-en-guerre.
En France, de belles figures individuelles comme celle du colonel Beltramme réhabilite la cohorte des Robocops.
La Démocratie bafouée
Plus fondamentalement c’est la question de la démocratie qui se pose. Jamais ce mot n’a été autant utilisé dans la bouche des dirigeants français . Pour affirmer le contraire de ce qu’ils font et justifier leurs actes de violence vis-à-vis des populations qui manifestent pour plus de justice et de fraternité. La « novlangue » est devenue un art complet pour tromper et manipuler les citoyens. Il ne trompe plus personne en louant le « courage » et le « sang-froid » des forces de l’ordre.
Cette démocratie est pourtant bien mise à mal sous couvert de sécurité et de protection. Les libertés sont bafouées et la récente volonté d’appliquer l’application Covid 19 déjà en cours d’installation sur les Smartphones sans l’accord des intéressés est la dernière trouvaille pour pister les gens et tenter de diminuer encore plus leur vie personnelle privée. Mêmes les drones ne leur suffisent plus.
Autres questions que je ne peux développer ici : celle du rapport à l’argent qui justifie toutes les exactions. Force est de constater que c’est lui qui aujourd’hui mène le monde dans ses dimensions politiques et économiques et boursières. Celle du profit qui prime sur l’homme devenu variable d’ajustement. celle des Médias, chiens de garde du Pouvoir qui entretiennent un statu quo en nous serinant la nécessité d’une répression au nom de « l’Ordre ». Celle de la majorité à la Chambre des députés-godillots qui avalisent sans sourciller des lois liberticides…
Pas de justice pas de paix
Que dire de la Justice aux ordres du pouvoir et qui embastille à tour de bras de paisibles manifestants sans distinction aucune ? Jugements à l’emporte-pièce parce qu’ils se trouvaient là.
Cette peur et cette insécurité sciemment voulues et entretenues par les pouvoirs en place remplissent partiellement leur rôle. Bien sûr, une bonne partie de la population, dans ses fonctionnement grégaires « obéissent » aux injonctions, parfois paradoxales des autorités. Cependant nous voyons de plus en plus de personnes qui tentent de réagir et de dire leur désaccord face à ces méthodes fascisantes.
Avant-hier, face aux urgences de Sisteron que l’on veut fermer, lors d’une manifestation cadrée et respectueuse des consignes, la police n’ayant donc rien à se mettre sous la dent pour distribuer ses amendes habituelles, a refusé tout simplement la harangue d’un manifestant pour stimuler et expliquer le pourquoi de ce rassemblement. Elle lui a interdit le droit de s’exprimer. Liberté d’expression à la poubelle !
Dérisoire ! La colère monte et gronde. Hier un « rassemblement Adam Traoré » (lui aussi asphyxié sous le poids de forces dit « de l’ordre »)a vu 20 000 personnes défiler (officiellement, donc au moins le double) malgré l’interdiction préfectorale.. une heure avant le rassemblement déjà constitué. Beaucoup de jeunes étaient présents. Cette bavure policière date de 4 ans.
Je présume que cette manifestation n’était que l’occasion de dire son mécontentement actuel face à des méthodes peu respectueuses de la dignité des personnes et sa colère aussi face à l’incompétence des pouvoirs publics pendant la crise du Covid 19.
Violence des « élites »
Car un des problèmes se situe là : dans le racisme, l’ostracisme, le mépris, le mensonge qui entraînent des injustices et des frustrations génératrices de sursauts violents et incontrôlés. On ne peut pas bâillonner indéfiniment un peuple qui ne demande qu’à vivre dans la justice, avoir un travail, soucieux de l’avenir climatique, vivre en paix avec ses semblables.
Rejeter la faute sur ces « fauteurs de troubles » est de l’ordre de la manipulation basse, abjecte, provocatrice de la part de soi-disant « élites » traficotant leurs petits intérêts au détriment du bien commun et se protégeant (comme Benalla non poursuivi et nommé en mai dernier directeur de la modération sur Facebook à la demande pressante de notre cher président et présenté comme « modèle pour l’Union européenne » par Mark Zukerberg, président de ce réseau social; comme le mari d’Agnès Buzin et autres Véran et Sanofi dans les magouilles concernant les vaccins aux promesses financières juteuses, comme la loi interdisant de filmer les violences policières …)
Où se situe alors la véritable violence ? Pourquoi les médias taisent-ils ces magouilles ?
Je suis le premier concerné
Je voudrais souligner de manière particulière combien ces manipulations et ces injustices me touchent. Le côté insupportable et manipulateur des dirigeants me mettent de plus en plus dans une colère noire. Et je ne suis pas le seul.
Se dit ici que l’origine de la violence se situe en chacun. Certains ont de bonnes raisons de donner libre cours à ces émotions qui les prennent à la gorge (éducation, malheurs de l’enfance, pauvreté, violences, exclusions, injustices criantes, toutes ces atteintes volontairement entretenues …). Ils n’ont pas eu le recul ou la capacité de s’y prendre autrement pour dire leur colère. Pour d’autres, la bêtise rivalise avec une méchanceté stupide et bornée. Pourtant, n’est-ce pas en chacun que se trouve la réponse à ces déferlements qui s’annoncent ? Car la vague de mécontentement monte, grossit, prend de l’ampleur au vu des catastrophes qui s’annoncent : climat, chômage, insécurité, perte de liberté, de toit, de santé, dislocation du vivre-ensemble …
La première « révolution » pour moi est en mon pouvoir. Prendre sur moi, fermement, le pouvoir de ne pas me laisser entraîner dans la spirale de la violence.
Sans pour autant baisser les bras. L’histoire me dit que la compromission, le désintérêt ou l’indifférence ont ouvert la route au fascisme de 39-45. J’ai à lutter pour dire mon désaccord, agir pour plus de justice et de paix. Mais le premier combat est entre mes mains, dans ma conscience, dans ma capacité à prôner les dialogues, proposer.
Quid de l’exemplarité ?
Certes, me dira-t-on, mais tous ces profiteurs qui ne veulent rien entendre ? Ces manipulateurs qui trompent leur monde ? Ces financiers qui vous écrasent et vous enfoncent dans votre malheur ? Cette police sans cervelle ? Ce 1% d’arrogants et de repus qui confisque la richesse et surfe sur la misère de ses semblables ? Ne serait-ce pas eux qui devraient faire le premier pas au titre de l’exemplarité ?
C’est Warren Buffet milliardaire américain qui déclarait qu’il existait « bel et bien une guerre des classes mais c’est ma classe, la classe des riches qui fait la guerre et c’est nous qui l’avons gagnée ».
Comment s’en sortir avec ces guerriers friqués (la fortune de 85 milliardaires équivaut à celle de la moitié de l’humanité) ? Depuis que le monde est monde ils existent et tentent d’aliéner et de profiter de leurs semblables. Mais depuis aussi que le monde est monde il se trouve aussi des hommes et des femmes, des témoins, des prophètes qui distillent leur message de paix et de fraternité.
Si certains hommes grandissent dans l’amoralité, le manque d’éthique et l’égoïsme, d’autres se lèvent pour bâtir un monde plus respectueux de chacun et de l’environnement. Question de choix.
Choix qui engagent.
Choix qui font grandir l’humanité ou la rabaisse à la loi de la jungle.
Choix de toujours pour amoriser et spiritualiser l’humanité ou la rabaisser au rang des animaux.
Choix qui « ne paient pas » mais qui libèrent face à d’autres qui « paient bien » et asservissent.
Aucun possible sans une solidarité universelle
Au-delà de cet « appel individuel » à grandir dans notre vraie dignité, se dessine une fraternité universelle pétrie des mêmes exigences et des mêmes attentes. Il nous faut chacun la rejoindre et élargir notre vision pour que la violence n’aie pas le dernier mot et ne nous mène pas au chaos.
Martin Luther King apôtre de la non-violence aux Etats-Unis affirmait : « l’obscurité ne peut pas chasser l’obscurité; seule la lumière le peut. La haine ne peut pas chasser la haine; seul l’amour le peut. »
Et si nous devenions ces hommes et ces femmes de lumière et d’amour ? Car l’argent ne mène pas le monde malgré les apparences. Comme l’Esprit planait sur les eaux et les ténèbres lors de la création du monde, il continue aujourd’hui à manifester sa présence sur le Monde et dans le cœur des hommes. Peut-être ne savons-nous pas ou plus l’entendre… Ses murmures pour construire la Paix et la Fraternité ne peuvent s’entendre qu’en se coupant du brouhaha qui nous submerge, nous infantilise et nous déconnecte de l’Essentiel. C’est possible.
Je crois que l’heure est grave. C’est un Kairos, un moment grave et opportun pour nous embarquer dans une civilisation de l’Amour. Pas celui à l’eau de rose mais celui qui nous met en souffrance et en passion pour qu’advienne une Amitié solidaire et pacifique entre tous.
Inévitable positionnement à faire
Pourtant, se pose la question de la violence nécessaire. Rester sans réaction quand tout aura été essayé de manière constructive et dans le dialogue et sera resté sans écoute et sans réponse interroge. Pire ! Ce sera systématiquement rejeté comme à l’Assemblée nationale par les députés de la majorité face aux propositions constructives de droite comme de gauche ou violemment réprimé …
Y a-t-il un seuil à ne pas dépasser ?
Peut-être celui des droits de l’homme que les puissants bafouent et assassinent ?
Énorme question dont je n’ai pas de réponse personnelle pour aujourd’hui.
Elle concerne la réflexion de tout un chacun pour se positionner pour son avenir immédiat et futur … pour ne pas vivre à genoux et pouvoir respirer….