J’ai conscience du côté provocateur de ces vœux par les temps qui courent. Et pourtant Dieu sait si nous avons soif de vœux significatifs !
A l’aube de cette nouvelle année je m’interroge sur ce dont elle va avoir le plus besoin…
Les raisons montent vite à l’esprit. Celles de toujours, inlassablement remises sur l’ouvrage : la paix, la justice, la fraternité, la santé, la sobriété … et tout ce qui nous a en partie manqué en 2020 : la confiance, l’espérance, la solidarité, la foi en l’homme, en sa capacité de dialoguer …comme des leitmotivs qui disent depuis des siècles la même soif des hommes au fond de leur cœur.
Comment cela peut-il advenir sans que chacun ne fasse sa part ? Tous les souhaits seront inutiles s’il ne met pas la main à la pâte.
La Joie
Et en examinant ce à quoi j’aspire le plus pour moi, pour mon entourage, la société et la planète ce qui monte dans mon cœur c’est la joie. Je constate que je suis en manque de joie dans cette temps difficiles et dans leurs cortèges d’esprits défaitistes.
Manque d’une joie profonde qui dépasse la superficialité d’un moment fugace ou d’un partage amical. Quelque chose qui dure, reste indéfectiblement présente malgré les aléas de notre époque et de nos états d’âme de vie. Quelque chose qui traverse la maladie ou le manque. Quelque chose qui s’ancre dans les eaux profondes de la confiance et de l’espérance. La joie comme moteur de tout le reste.
A écrire cela je devine que cette joie là ne sera pas au bout de mes efforts, de mes moyens pour tenter de l’acquérir et d’y demeurer.
J’aspire pour moi et pour tous à une joie jubilatoire qui transcende les petits bonheurs humains, déjà bienvenus dans nos difficiles traversées humaines. Mais, nous en faisons l’expérience, ces petits moments heureux ne nous comblent pas. Et nous pressentons qu’il y a quelque chose de plus : de plus immense, de plus beau, de plus vrai, de plus profond qui gite quelques part, hors de nos mainmises ou de nos désirs d’accaparement, hors de repas festifs ou de nos voyages au loin pour nous changer les idées. Cela nous fait du bien sur le moment mais laisse un goût d’insatisfaction. Même les engagements, pourtant sources de satisfaction ou de contentement, arrivent à décourager et laissent en moi, en nous, des gouts d’amertume et d’aquoibonisme…..
Hymne à la Joie
On rapporte que Beethoven a écrit sa symphonie « Hymne à la Joie » alors qu’il était complètement sourd. Qu’est-ce qui pouvait le motiver pour écrire ce monument musical, un des plus grands chefs-d’œuvre universel ? Les paroles du poète Schiller sur lesquelles l’Ode a été composée peuvent nous donner une explication : tous deux, Schiller et Beethoven, partageaient des idéaux de fraternité, de liberté, de paix et de solidarité pour tous les hommes. C’est cette vision qui pourrait être incarnée par l’Europe qui deviendra son hymne.
On pourrait dire que c’est là la part de l’homme : bâtir une fraternité universelle. C’est à la portée de tous pour peu qu’ils soient de bonne volonté : « Tous les êtres boivent la joie aux seins de la nature ; Tous les bons, tous les méchants suivent sa trace parsemée de roses … «
Mais, comme le laisse entendre Schiller, il manque une autre dimension :
Frères ! Au-dessus de la voûte étoilée doit habiter un père bien-aimé. Vous vous effondrez, millions ? Monde, as-tu pressenti le Créateur ? Cherche-le par-delà le firmament ! C’est au-dessus des étoiles qu’il doit habiter. »
Noël nous a rappelé cette évidence oubliée : la Joie s’accueille, se reçoit. Dans un abri d’infortune, dans la pénombre discrète d’une mangeoire, des migrants qui ne trouvaient pas leur place dans la société de l’époque mettent au monde un frêle enfant. D’autres exclus qui puent le bouc ou le mouton viendront « voir » un banal événement qui va devenir avènement pour le monde entier. Le ciel s’allie à la terre avec les anges pour chanter la joie d’une naissance.
Que se passe-t-il ? Ce jaillissement de joie de mettre un seul enfant au monde, est fête pour tous les hommes et les anges. Donner la vie, et sous quelque forme que ce soit, est source de bonheur.
La joie comme chemin
Les premières paroles de cet enfant Jésus devenu adulte seront « Heureux les pauvres ! Heureux les artisans de paix ! » : Voilà un premier chemin qui se dessine : se désencombrer de tout le superflu qui nous déconnecte de notre source intérieure. Se faire pauvre, être artisan de paix dans les guerres que nous nous livrons à et en nous-mêmes : Quels brouhaha et remue-ménages dans nos cinémas intérieurs ! Se faire pauvre, non pas tant financièrement que d’accepter de ne pas être sa propre origine et le créateur de son petit bonheur. Dur parfois, quand on croit qu’on va y arriver, qu’on en prend les moyens, que nos efforts seront payants …
Des siècles plus tard, un de ses disciples, François, le Povorello d’Assisse, prononcera des paroles qui invitent encore aujourd’hui à entrer dans l’espérance, quand autour de nous le chômage, le deuil, la maladie, les impasses, la violence et même nos propres tristesses, font rage : « Là où est la tristesse que nous mettions la joie ».
Il nous dit que même au cœur des situations les plus dramatiques il y a en nous une Source qui ne tarit pas pour peu que nous la désensablions. Et c’est dans l’ouverture aux autres que la joie surgira de plus en plus abondamment.
Plus facile à dire qu’à faire ? Pourquoi ne pas essayer ? Rien ne sera enlevé de nos misères et de nos souffrances, de nos inquiétudes et de nos impuissances mais elles peuvent être habitées par l’espérance et transcendées par cette joie de se savoir aimé des hommes et de Dieu.
« Le bonheur n’est réel que lorsqu’il est partagé » C. Candless
Peut-être que là réside la joie profonde, celle loin des artifices, des superficialités et des stérilités apparentes, celle qui fait l’unité entre les hommes parce qu’elle s’origine dans un demeurer dans un Amour qui nous surpasse et un Don partagé.
La seule parole de Jésus que Saint Paul rapporte c’est : « Comme le dit le Seigneur Jésus, il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir ».
Une personne qui l’a bien comprise c’est Edouard Houis qui vient de faire son passage à 103 ans ! Vous pouvez découvrir un billet que je lui dédie ici ;
Pour 2021 nous aurons besoin de puiser à la Source de cette Joie et de nous y ancrer face aux défis qui nous attendent.
Voilà ce à quoi nous invite la grande, la joyeuse, l’heureuse conjonction astrale
des jours derniers :
Croyons que l’univers tout entier, ciel et terre, participe à notre joie, si petite soit-elle !
Là-haut, c’est la danse des étoiles à chaque instant où nous nous donnons
Sur terre, nous sommes les artisans d’un monde nouveau quand nous nous mettons
en marche pour faire briller des étoiles dans les yeux, les cœurs et autour de nous !
Alors pour l’an neuf si incertain,
pour vivre la joie, la vraie, celle qui est nous donnée, on se met en route tous ensemble ?
… pour que notre joie soit parfaite et partageuse …
Joyeuse année 2021 !
Merci Xavier de nous inviter à la Joie. Celle que nous ne pouvons pas nous donner à nous mêmes mais recevoir de » la Source » qui est en chacun de nous.