Comme en écho au reportage d’Arte hier soir sur les viols des religieuses par des prêtres, les lectures du jour en cette entrée en carême nous invitent au jeûne, à l’aumône et à la prière. Phrase du Christ qui nous dit par 3 fois : « Ne soyez pas comme des hypocrites »…
En ce Mercredi des Cendres, ne faudrait-il pas que certains prêtres soient invités à « descendre » (et pas seulement le mercredi !) de leur piédestal fait de cléricalisme, de soif de pouvoir, de mépris cachottier, et d’assurance de pouvoir opérer en toute impunité ?
Comme en écho encore, à chaque « Hypocrites ! « le Christ propose la discrétion et la certitude que le « Père qui voit dans le secret rendra » ces gestes de partage, d’altruisme et d’ouverture au centuple.
Tout cela, dira-t-il, « faites-le dans le secret » (6 fois ce mot) et non pour vous faire (bien) voir des hommes.
Mais il affirme aussi qu’il est des secrets qui seront dévoilés (« … car il n’y a rien de caché qui ne doive être découvert, ni de secret qui ne doive être connu… ») comme il en est qui doivent se vivre comme des trésors à cacher au fond de son cœur.
Merci à ceux qui ont osé rompre la loi du silence si longtemps entretenu pour cacher les malversations criminelles de certains.
Des questions surgissent pour moi à la suite de ce reportage glaçant où l’on découvre ceux qui disent et ne font pas, ceux qui tiennent des discours moralisateurs sur la sexualité et vivent en dépravés, ceux qui tiennent le haut du pavé avec fierté et sans considération pour les plus petits ….
– A toutes ces victimes de prêtres violeurs de leur corps et de leur âme je veux exprimer ma compassion et leur dire que mon « carême » se vivra à leur intention pour qu’elles se dressent dans leur dignité et retrouvent santé tant morale que spirituelle et physique.
– Je connais des amis prêtres, fidèles, heureux dans leur célibat, ayant consacré leur vie à l’annonce d’une Bonne Nouvelle. Je les sais en souffrance et dans le désarroi. Peu aidés, voire combattus ou ignorés par certaines de leur hiérarchie. Je veux leur témoigner également ici de ma prière et de mon amitié à leur intention.
– Inévitablement aussi se pose la question de la suspicion. Tel prêtre muté : un violeur ? un dépravé ? tel évêque : un manipulateur et un homme qui cache la vérité ? Quel regard porté désormais sur les uns et les autres ? Les dégâts sont déjà lourds et vont hypothéquer encore pour longtemps la confiance nécessaire à une vie de foi commune…
– Se pose encore la question de « l ‘appartenance » à cette institution et, au-delà, sa raison d’être en tant que telle. Il y a de moins en moins en elle d’humanité malgré ses discours « d’experte »; un décollage impressionnant du réel pour se réfugier dans une spiritualité éthérée; un tri sélectif entre les « bons » cathos et ceux qui du coup se sentent rejetés aux marges, qui défie toute notion de communauté et d’unité; pire, un sentiment d’abandon qui donne l’impression d’être soi-même menteur et hypocrite parce que la confiance en cette institution hiérarchique n’existe plus; parce que l’impuissance du laïc face à « l’autorité » rend schizophrène et que trouver où prendre sa place en liberté devient illusoire.
N’est-il pas venu le temps de quitter cette chrétienté médiévale, ce christianisme institutionnel froid , ce mode clérical pervers et calculateur ?
Il est des hommes d’Eglise qui invitent à retrouver ce qu’ils appellent une « christité » (1) ou une « christianité » c’est-à-dire une manière nouvelle à la fois personnelle et en petite communauté de demeurer dans un in-ouï de la Parole évangélique qui nous met au monde de manière nouvelle et nous envoie à lui, vers cette Eglise qu’est l’humanité porteuse en chaque homme d’une « étincelle » du Christ ?
Pour ces hommes qui appellent au renouveau, même le concile Vatican II est de l’ancien monde patriarcal et entretient des attitudes de hiérarchie, de dogmatisme, de morale irrecevable pour l’homme d’aujourd’hui.
L’heure n’est elle pas venue d’élargir au dimension du monde, à commencer par le nôtre propre, au-delà du monde catholique et chrétien engoncé dans son histoire et ses compromis ? à entendre le Souffle nouveau qui appelle à se libérer de structures aliénantes ? à marcher au Souffle libérateur sur la route des hommes ?
Alors l’Institution, ou ce qu’il en restera, sera « ce qui doit faire voir et faire venir l’unité de l’humanité ». Elle ne sera plus au service de sa propre survie mais de celle de l’humanité, où qu’elle soit, aimée de Dieu.
La voici convoquée à inventer du neuf pour tous.
1- voir ici http://www.lachristite.eu/archives/2014/04/01/29569347.html