Les damnés de la terre

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Le journal l’Humanité dans son édito du 7 octobre nous interpelle :
 » Précarité ? La meilleure alliée de la pandémie… Si elle ne nous étonne guère, l’étude réalisée par Médecins sans frontières (MSF) entre le 23 juin et le 2 juillet, la toute première du genre en France et en Europe, donne froid dans le dos et éveillera peut-être quelques consciences bien éteintes : plus d’une personne sur deux en grande précarité, pour l’essentiel des migrants, a donc été infectée par le Covid-19. Un taux parmi les plus élevés jamais observés. Ces résultats impitoyables démontrent une prévalence énorme, supérieure à ce que les spécialistes peuvent observer en Inde ou dans les bidonvilles du Brésil…« 

Une étude qui « donne froid dans le dos et éveillera peut-être quelques consciences bien éteintes… «  Ces mots « peut-être », « quelques », « éteintes »  laissent supposer un découragement et un fort doute sur la capacité des hommes à sortir de leur individualisme.
Etonnant de voir ces appels à un plus d’humanité qui viennent de tous bords (pape François, communistes, associations multiples). Ils tombent à plat et ne soulèvent aucune compassion. A moins qu’ils ne se heurtent à une certaine forme d’impuissance : Que faire ? Comment agir ?
Dans ce cas les gouvernants auront réussi l’impossible. Régner par la peur et la terreur.
Un des lieux de la répression concerne les libertés associatives. Les associations deviennent suspectes, avec le lot de violences qui leur tombe dessus :  Atteintes à la réputation, suppression des subventions, criminalisation… A Calais, on embarque et enferme des militants quand on veut donner du pain à des affamés; dans le Morbihan le préfet interdit les transports de musiciens avec leurs instruments. Quand l’ignominie joue avec la bêtise.

Pour en revenir aux migrants, la violence institutionnelle n’a plus de borne. D’autant moins qu’elle flatte les instincts les plus primaires des hommes. Elle surfe sur les acquiescements implicites de populations déjà elles-mêmes en situation de grande pauvreté qui ne trouvent rien de mieux que de se venger sur plus misérables qu’elles.
… Diviser pour avoir la paix et faire passer les profits.

Le pape François dans Fratelli tutti dresse un constat sombre et inquiet :
«[39]  « dans certains pays d’arrivée, les phénomènes migratoires suscitent des alarmes et des peurs, souvent fomentées et exploitées à des fins politiques. Une mentalité xénophobe de fermeture et de repli sur soi se diffuse alors ». Les migrants ne sont pas jugés assez dignes pour participer à la vie sociale comme toute autre personne et l’on oublie qu’ils ont la même dignité intrinsèque que quiconque. C’est pourquoi ils doivent être « protagonistes de leur propre relèvement ». On ne dira jamais qu’ils ne sont pas des êtres humains, mais dans la pratique, par les décisions et la manière de les traiter, on montre qu’ils sont considérés comme des personnes ayant moins de valeur, moins d’importance, dotées de moins d’humanité. Il est inacceptable que les chrétiens partagent cette mentalité et ces attitudes, faisant parfois prévaloir certaines préférences politiques sur les convictions profondes de leur foi : la dignité inaliénable de chaque personne humaine indépendamment de son origine, de sa couleur ou de sa religion, et la loi suprême de l’amour fraternel.

40. « Les migrations constitueront un élément fondamental de l’avenir du monde ».Mais, de nos jours, elles doivent compter avec la « perte du ‘‘sens de la responsabilité fraternelle’’, sur lequel est basé toute société civile ».L’Europe, par exemple, risque fort d’emprunter ce chemin. Cependant, « aidée par son grand patrimoine culturel et religieux, [elle] a les instruments pour défendre la centralité de la personne humaine et pour trouver le juste équilibre entre le double devoir moral de protéger les droits de ses propres citoyens, et celui de garantir l’assistance et l’accueil des migrants ».

41. Je comprends que, face aux migrants, certaines personnes aient des doutes et éprouvent de la peur. Je considère que cela fait partie de l’instinct naturel de légitime défense. Mais il est également vrai qu’une personne et un peuple ne sont féconds que s’ils savent de manière créative s’ouvrir aux autres. J’invite à dépasser ces réactions primaires, car « le problème, c’est quand [les doutes et les craintes] conditionnent notre façon de penser et d’agir au point de nous rendre intolérants, fermés, et peut-être même – sans nous en rendre compte – racistes. Ainsi, la peur nous prive du désir et de la capacité de rencontrer l’autre ».

Mais avons-nous encore en nous ce désir de rencontrer l’autre ?
Il est plus simple de se recroqueviller dans un entre-soi apparemment sécurisant (en repoussant pour plus tard le retour de bâton), en refoulant aux frontières de l’Europe, loin des yeux et loin du cœur, ces êtres humains… que nos gouvernement considère comme du bétail. Ni plus, ni moins… ou, s’il reste une once d’humanité en les pourchassant…

Parmi les associations qui crient dans le désert : Oxfam.
Elle ne dénonce pas seulement les conditions de vie au sein des camps ou des bidonvilles (comme j’en faisais l’écho ici il y a quelques semaines à propos de Moria) mais plaide auprès des principaux responsables de cette tragédie: l’Union européenne et ses politiques migratoires.

« Nous avons assisté depuis longtemps à des refoulements aux frontières grecques, à des détentions systématiques. Mais nous témoignons également, depuis des mois, de garanties insuffisantes au sein même des processus de demandes d’asile : des processus accélérés sans accompagnement, pas d’accès à un médecin pour déterminer le degré de vulnérabilité d’une personne, un élément pourtant clé au moment du choix de la procédure à suivre, un manque d’informations sur les étapes et les délais… Des procédures qui semblent accroître les « chances » qu’une personne fuyant les conflits, les persécutions ou la guerre, ne bénéficie pas de la protection internationale, au lieu de réellement permettre le respect du droit d’asile. »

à l’entrée de l’hiver,
MSF lance un appel aux dons
tout comme Oxfam
ou encore CCFD terre solidaire

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