Je suis pour trois semaines en cure thermale à Digne les bains. Un accident s’est déclaré avec une double fuite de chlore et d’acide. (voir article de presse ici) Je relate ici mes impressions lors de ce vécu particulier :
Ce samedi 10 juin, je faisais partie des personnes victimes d’inhalation de chlore et d’acide aux thermes de Digne les Bains. J’ai vécu une expérience de l’intérieur que je vous partage :
Le « Plan Blanc » a été déclenché avec célérité et je voudrais ici saluer les professionnels qui se sont mobilisés.
Tout d’abord, le personnel des Thermes qui a su vite évacué les 300 curistes qui se sont retrouvés avec le personnel dans une sorte d’hôpital de campagne sur le parking en face.Ensuite, les pompiers réquisitionnés dans un rayon de 50 kms, la gendarmerie, les ambulanciers qui sont rapidement intervenus.
Souffrant de difficultés respiratoires, je me suis retrouvé assis sur le bitume contre une barrière de sécurité. Outre la rapidité d’intervention, j’ai pu observer combien les pompiers ont mis en place toute une structure d’intervention avec professionnalisme, compétence et savoir-faire. Sans affolement mais avec beaucoup de méthode pour évaluer le degré d’urgence pour prioriser la prise en charge des victimes. Les processus de priorité d’intervention maîtrisés lors des exercices de simulations semblent bien acquis ! J’ai été rapidement mis sous masque à oxygène. J’ai pu répondre alors aux questions de santé, de malaise, d’antécédents, tout en étant examiné par un médecin pour l’auscultation des poumons, surveillé pour le pouls, la tension, par une infirmière, avec la présence constante d’un ambulancier tout près de moi.
Image impressionnante de voir ces curistes, certains en tenue de bains, le personnel des thermes autour des professions de santé et de sécurité, au milieu de véhicules rouges, bleus, jaunes d’intervention. Je vivais par le dedans ce que je pouvais voir lors d’intervention de ce type à la télévision.
C’est en convoi de 4-5 ambulances que nous avons été transportés aux urgences de l’hôpital de Digne. Lui aussi réquisitionné dans l’urgence. Je découvrirai comment, tout en s’occupant de moi, une infirmière répondait aux appels de ses collègues en congés qui demandaient s’il était nécessaire de regagner leur poste ou pas. Ici aussi, compétence, méthode, disponibilité, savoir-faire mettent chacun en confiance pour traverser des moments qui peuvent être angoissants pour certains. Examens de sang, radios pulmonaires, médications : tout est fait pour diagnostiquer en complément ce qui a été initié par les médecins et les pompiers aux Thermes et soigner. Même le souci du repas a rapidement été pris en charge.
Nous avons la chance de pouvoir bénéficier de professionnels et de bénévoles compétents et dévoués. Même si certains responsables politiques en profitent pour les louer mais faire si peu en ne les aidant pas à mieux exercer leur mission. Mais cela est une autre histoire. Je voudrais les saluer et les remercier pour la qualité de leur présence, leur dévouement. Qui a dit que la solidarité se perdait ? J’ai fait hier l’expérience que non. Dans la détresse, il est des personnes qui savent allier professionnalisme et attitudes de compassion et de solidarité. Que serait l’un sans l’autre ? Quand nos politiques sortiront d’attitudes comptables, technocratiques, financières et sauront donner les moyens d’exercer en temps et en qualité humaine et relationnelle, notre société ira beaucoup mieux je crois.
Enfin je me permets ici une petite remarque qui me semble avoir une grande importance dans les faits. Le bâtiment des Thermes est tout en longueur, au pied de la falaise. Les piscines (d’où est venue la fuite de chlore) d’un coté et les soins de boue, de kiné etc… de l’autre. Lors de « l’accident », au tout début, ne sachant pas trop comment réagir, le personnel a consigné les curistes dans la zone la moins exposée. Puis est venu l’ordre d’évacuation en urgence. Je crois que c’est là que les procédures d’évacuation ne sont pas au point. En effet, dans la tête des curistes, évacuer c’est récupérer ses effets vestimentaires et sortir. Or les casiers et les cabines de déshabillage sont du côté des piscines : c’est comme si tous se précipitaient, comme dans une nasse, vers le lieu où se trouve le danger. Chose aggravante, dans ces couloirs de cabines où l’on se change ce fut la cohue chacun voulant prendre ses effets et éventuellement se changer. Moi-même j’ai été embarque dans cette logique et c’est là que je me suis fait intoxiqué. Je crois que des leçons seront à tirer avec l’établissement et les pompiers pour évaluer ce qui s’est passé. A mon avis la sécurité a été mise en défaut dans ce moment d’évacuation. Je transmettrais mon avis à l’établissement et aux pompiers pour une meilleure prise en charge future.
Un grand merci donc et toutes mes félicitations à tous les intervenants. Je devais honorer leur professionnalisme et leur dévouement. Aujourd’hui, dimanche, je vais beaucoup mieux après une bonne nuit.