Chrétiens et Gilets jaunes 3

3 La théologie de la libération

Après la libération des hébreux de leur esclavage en Egypte, la vie du Christ comme appel à refuser toute compromission, je voudrais aujourd’hui, dans ce troisième volet, aborder la Théologie de la libération comme légitimation de la protestation contre la misère . Et ceci en tant que chrétien. 
Pour situer mon propos lire l’intro de mon premier post :

C’est quoi cette bête là ? Wikipédia (j’ai beaucoup emprunté à ce site pour cet article) résume en ces mots : La théologie de la libération est un courant de pensée théologique chrétienne venu d’Amérique latine, suivi d’un mouvement socio-politique, visant à rendre dignité et espoir aux pauvres et aux exclus et les libérant d’intolérables conditions de vie.
Enracinée dans l’expérience biblique du peuple juif guidé par Dieu au-delà de la mer Rouge et à travers le désert — d’une terre d’esclavage (Égypte) à la Terre promise (Exode, ch. 12 et suivants) — elle est un « cri » prophétique pour plus de justice et pour un engagement en faveur d’un « Règne de Dieu » commençant déjà sur terre. La réflexion théologique part de la base : le peuple rassemblé lit la Bible et y trouve ressources et inspiration pour prendre en main son destin.

Ce courant a eu et a toujours mauvaise presse dans les milieux traditionalistes chrétiens et surtout catholiques. On devine le pourquoi : un peuple qui prend en main son devenir et lutte pour plus de justice et de dignité devient responsable et n’est plus aussi manipulable par les gens de pouvoirs tant civils que religieux. Si vous ajouter le fait que, pour entrer dans cette lutte d’humanisation, il faille comprendre le pourquoi de leur état de pauvreté de misère ou d’exploitation il n’y avait à l’époque comme outil de « décodage » (et sans doute encore aujourd’hui) que l’analyse marxiste pour comprendre les rouages du système dans lequel ils se trouvaient dépendants. Mon Dieu ! Des communistes ! Continuer la lecture de « Chrétiens et Gilets jaunes 3 »

Chrétiens et Gilets jaunes 2

2) La vie du Christ comme appel à refuser toute compromission

Jésus chasse les vendeurs du Temple

Après la sortie d’Egypte, je voudrais aujourd’hui aborder la vie du Christ comme appel à refuser toute compromission. Pour situer mon propos lire l’intro de mon premier post :

C’est déjà difficile d’accepter, pour certains chrétiens, que le Christ soit mort du fait des autorités religieuses en place. Du fait de leur collusion avec le pouvoir politique de l’époque. Encore plus difficile pour eux d’accepter son refus de toute religion qui enferme, dénature toute relation avec la transcendance qu’il appellera « Père ».  Et vraiment, vraiment difficile, qu’il mette au rebut règles, lois commandements, dogmes si ceux-ci ne sont pas vécus dans l’ordre de l’amour fraternel.

Il reprend à son compte ce qui pressentaient les prophètes de l’ancien temps en disant « C’est l’amour que je veux, et non les sacrifices. »
Matthieu illustrera le concret de cette invitation par cette parabole :
“… J’avais faim, et vous m’avez donné à manger; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli; j’étais nu, et vous m’avez habillé; j’étais malade, et vous m’avez visité; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi!”et fera dire au Christ « je vous le dis, chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait.”
C’est concret, c’est la religion du frère, en particulier de celui qui est dans l’inhumanité profonde. Continuer la lecture de « Chrétiens et Gilets jaunes 2 »

Chrétiens et Gilets Jaunes 1

Chrétiens et Gilets jaunes

Peut-être serait-il intéressant que les chrétiens (et les autres) s’ouvrent aux grands « événements » de l’histoire biblique,  aux paroles évangéliques et à la doctrine sociale de l’Eglise pour éclairer leur démarche vis-à-vis (ou avec) les gilets jaunes aujourd’hui.
Je voudrais en quelques posts reprendre quelques thèmes qui peuvent les « inspirer ».

Je retiendrais quelques approches qui m’ont éclairé dans ma réflexion.: la sortie d’Egypte, l’attitude du Christ durant sa vie publique, la doctrine sociale de l’église, la théologie de la libération et les appels du du Pape François.

Les attitudes frileuses de certains chrétiens m’interrogent. Des commentaires sur des réseaux sociaux de groupes dits « ouverts » (ou se positionnant comme tels) m’interrogent quant à leur critiques parfois épidermiques  sur la vie sociétale aujourd’hui; Vieux relents d’observances de l’autorité ? « Valeurs » chrétiennes d’obéissance, de respect, d’ordre, dénaturées ?  Vécu d’une religion (plus que de foi) désincarnée ou idéalisée, déconnectée des réalités d’aujourd’hui ? Morale personnelle en berne parce que sans référence ajustée ? Je m’interrogent sur cette fêlure/rupture entre foi et vie sociale/sociétale. Un de mes amis communistes s’exaspérait lors des dernières présidentielles : « mais, non d’un chien ! tous les chrétiens devraient être révolutionnaires comme le Christ ! ». Le « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » est bien pratique pour justifier ce qui me semble être une démission facile et tranquille. On oublie que « rendre à Dieu ce qui est à Dieu, » c’est faire en sorte que tout serve à la liberté, à la dignité, à la grandeur des  êtres humains. Cette parole du Christ demande qu’on cesse de servir l’argent comme un but en soi, pour lui-même, comme une idole, comme une source d’enrichissement au détriment des hommes.

Alors, loin de vouloir chercher justification ou explication et de vouloir tomber dans des débats houleux je voudrais partager  ci-après quelques convictions de croyant.

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La montée des « Gueux »

… Devant la colère légitime des GJ et l’aveuglement des autorités publics qui s’entêtent à  rien lâcher de leurs richesses et de leurs pouvoirs, devant la montée toujours plus grande des violences attisées par des propos « d’élites responsables » qui soufflent sur les braises, se sont remémorées en moi les marches de Martin Luther King, de Gandhi, celles des femmes du Kerala en Inde, des paysans sans terre au Brésil  … toutes pacifiques et non violentes et , ô combien  !, fructueuses.
« I have a dream… »  racontait le premier.
Moi aussi j’ai fait un rêve. Celui de bannir toute haine et toute violence pour sortir des impasses et des fermetures, des insécurités et des pauvretés, des mépris et des suffisances dans lesquels nous nous trouvons.
J’ai rêvé d’une Marche où, au fur et à mesure de son avancée vers la capitale, elle prendrait les sentiers pour démarrer; puis les départementales et les nationales, le nombre de marcheurs  grossissant… Et pourquoi pas les autoroutes indignes !

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Face au défaitisme et à la colère ambiante le catholique doit mettre en avant l’altruisme, la solidarité …

Suite au post précédent où je souhaitais mes vœux, voici un article des paroissiens progressistes qui prolonge ma réflexion de manière pertinente :

« Au moment où la désespérance est de mise et la colère grimpe, nous les catholiques ne soyons pas entre le soutien et l’accommodement à l’inacceptable. Il faut avoir le courage de s’y opposer, et défendre au nom de nos valeurs chrétiennes tous les persécutés et les humiliés de la société. Aujourd’hui encore, beaucoup de catholiques sont attentistes vivant sur la conception rigide de l’«autorité légitime». Il faut s’affranchir de cette théologie.

Les catholiques doivent découvrir leur capacité à résister, à prendre conscience de leur force. Les compromissions créent des situations confuses et équivoques qui ne reflètent ni la clarté ni la fierté des Évangiles, des Actes des apôtres et des Épîtres de Saint Paul. La foi chrétienne ne saurait se replier sur «la ligne intérieure de la religiosité», indifférente à la question du temporel.
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Meilleurs vœux 2019 !

2019, l’année de tous les possibles, l’année de tous les devoirs. Oui c’est à la fois possible et nous devons le réaliser.
Nous voici au pied du mur de l’année qui vient. Belle expression ! l’année qui vient à nous, comme un rendez-vous à honorer.
Qu’en faire ?

Paris VIIIe , le 24 novembre 2018. Manifestation des gilets jaunes à Paris. Champs Elysées.

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Joyeux Noël ! Bonne et heureuse année 2019 !

Quand le bœuf et l’âne devisent dans la crèche, le premier dit au second son souhait d’aller en Inde car dans ce pays les bovins sont comme des dieux. Pour l’âne, son désir est d’aller en France car dans ce pays les ânes sont nommés au gouvernement.
C’est une anecdote qui traine sur les réseaux sociaux.  Signes des temps : en cette période hivernale fleurissent les Gilets Jaunes et, alors que le réchauffement climatique et les injustices battent leur plein, il y a encore de la dérision en France même quand son peuple est inquiet de son avenir ou en colère…
Au-delà de l’humour, il nous faut entrer plus profondément dans la signification de cet Enfant qui naît.
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Discours de Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018

Chapeau bas monsieur Mukwege !
Merci pour vos actions et pardon pour nos mutismes et nos indifférences … Les Nations unies ont salué une annonce « fantastique » qui « aidera à faire avancer le combat contre les violences sexuelles comme arme de guerre dans les conflits ». « C’est une cause chère aux Nations unies », a précisé la porte-parole de l’ONU à Genève, Alessandra Vellucci.
Hypocrisie sans nom : vous le verrez, dans ce discours, l’Onu tait les noms des assassins et laisse croupir les dossiers de cette affaire…
Discours de Denis Mukwege, à Oslo le 10 décembre 2018.
Dans la nuit tragique du 6 octobre 1996, des rebelles ont attaqué notre hôpital à Lemera, en République Démocratique du Congo (RDC). Plus de trente personnes tuées. Les patients abattus dans leur lit à bout portant. Le personnel ne pouvant pas fuir tué de sang-froid. Je ne pouvais pas m’imaginer que ce n’était que le début. Obligés de quitter Lemera, en 1999 nous avons créé l’hôpital de Panzi à Bukavu où je travaille encore aujourd’hui comme gynécologue-obstétricien.

La première patiente admise était une victime de viol ayant reçu un coup de feu dans ses organes génitaux. La violence macabre ne connaissait aucune limite. Cette violence malheureusement ne s’est jamais arrêtée.
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La destruction des classes moyennes

Voici un entretien paru dans le dernier numéro d’Etudes de décembre 2018. Je l’ai trouvé très éclairant  sur la situation sociale économique et politique dans laquelle nous vivons aujourd’hui.
C’est un peu long; il nous faut prendre le temps de décoder la société dans laquelle nous vivons aujourd’hui et comment s’installe des modes de fonctionnements sociétaires qui conduisent à des impasses.

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