La liturgie du jeudi 8 juin nous présentait un texte de l’Ancien testament, tiré du livre de Tobie (dans la liturgie catholique, car les Protestants n’ont pas retenu ce livre dans leur bible). L’extrait m’a interpellé. Voila une belle histoire d’amour. Elle se décline entre amis, entre promis et promise, entre mari et femme, entre parents et enfants. Ce ne sont que des extraits, et l’intérêt serait grand de prendre le temps de lire ce court texte en entier. Voici ce qui est monté en moi.
Une lecture superficielle pourrait y voir une belle histoire qui finit bien. A lire de plus près ce texte, des bizarreries surviennent. Je n’en retiendrais qu’une : celle de la fraternité (et de la sororité). Nous retrouvons 5 fois le mot « frère », 3 fois le mot « sœur », 6 fois le mot « fille ». Cette bizarrerie est d’autant plus accentuée que ces mots sont adressés aux uns et aux autres sans tenir compte de la signification réelle du mot. Par exemple, frère pour l’ami ou l’oncle, fille pour l’épouse, sœur pour la fiancée… Toute la structure traditionnelle de la famille ou des relations, avec les rôles spécifiques de chacun, se trouve complètement bousculée.
Je suis sensible à la situation des migrants. Sans doute des « restes » de mon implication au CCFD Terre solidaire et à la situation de deux de mes enfants au loin : l’une, avec sa petite famille, retourne à la Réunion où elle a déjà vécu plus de 10 ans : il faut le dire : la tentative de se réinsérer en métropole pendant un an a buté sur l’indifférence et l’individualisme des autochtones. Un autre de mes fils habite au Brésil depuis 18 ans. Il y est resté sans papier pendant près de 10 ans.
L’actualité récente met les migrants et les réfugiés en avant :
– 79 morts et des centaines de disparus la semaine passée sur un bateau surchargé qui a coulé au large de la Grèce. Beaucoup de questions sont posées sur la passivité de Frontex présent sur les lieux. Peu de commentaire sur les médias.
– C’est vrai qu’à trier de manière sélective leurs informations, l’affaire d’Annecy était plus porteuse d’émotion et de rancœur vis-à-vis de ces étrangers qui nous « envahissent ». Un chrétien de Syrie, père de famille, malade psychique, attaque et poignarde des petits enfants dont le plus jeune a 22 mois. A juste titre, ce fut l’horreur et l’incompréhension dans tout le pays. « Poignarder l’innocence, c’est poignarder l’avenir» affirmait Patrick Le Hyaric dans son dernier édito. Il y affirmait : « Comme après chaque drame désormais, jusqu’à l’abjection, une cohorte de responsables politiques, de la présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale en passant par le sinistre Ciotti, voyagent dans le même wagon-lit poisseux de l’extrême droite avec Le Pen et Zemmour. Comme des rapaces, les uns et les autres se sont jeté sur les torrents de larmes causées par la lâcheté d’un homme, pour déverser leur haine et remettre en cause le droit international, le droit d’asile, l’immigration.Ce fut pour eux, une aubaine pour tenter de faire oublier la loi des 64 ans et les méthodes antidémocratiques déployées pour l’imposer. « Chaos migratoire » crie le sinistre Ciotti. « Rétrécir le droit d’asile » s’enflamme Le Pen. « Il y a plus important que les conventions internationales, il y a la survie du peuple français » éructe Zemmour tandis que ses amis de Génération identitaire appellent à « une reprise en main virile de notre civilisation ». Ils ont été déçus que ce criminel ne soit pas musulman. Il se revendique chrétien. Oui, mais alors !… « Un mauvais chrétien » s’est-on exclamé sur Cnews. »
Et il y a une montée en puissance de la fachosphère (et souvent cathosphère) menaçant et attaquant les associations de solidarité et certains maires, brûlant leur maison, les forçant à démissionner car ils avaient accepté l’établissement d’un centre d’accueil dans leur ville. Les larmes de crocodile tardives du gouvernement ne leur apportaient aucun soutien.
– Autres exemples « positif » de l’actualité récente, la décision de panthéoniser Missiak Manouchian et son épouse Mélinée. Voila un homme rescapé du génocide arménien. Adolescent, il avait traversé la Méditerranée en clandestin, pour débarquer à Marseille sans papiers, sans asile et sans ressource. « Il s’était épris de cette terre d’accueil, au point de mourir pour elle, pour ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité, dont il entretint la flamme dans la nuit de l’occupation nazie, avec des milliers d’autres résistants communistes étrangers » (journal l ’Humanité). Apatride, épris de Baudelaire et de Victor Hugo il avait fait par deux fois sa demande de naturalisation française. Elles furent refusées. Il était pourtant profondément attaché à la France de la Révolution et des droits de l’homme. Il est le symbole de cette foule d’étrangers, Espagnols, Italiens ou Juifs d’Europe centrale, engagés dans la lutte contre l’Allemagne nazie. Comme beaucoup d’autres, il a donné sa vie pour la France. « iIs symbolisent une certaine idée de la France : une nation politique, composée de citoyens de toutes origines, réunis par des valeurs universelles ».
– Et il y a, pour moi, Oumar. Qui est-il ? Je l’avais croisé il y a quelques temps. Hier nous avons pu deviser ensemble plus longuement à l’occasion d’un mariage ce week-end. Oumar est guinéen, de Conakry. Il a laissé sa famille dans son pays d’origine, aux mains d’un pouvoir miliaire, en remontant vers le Maroc, traversant la Méditerranée sur un Zodiac pour atterrir à Marseille via l’Espagne. Depuis deux ans, il est à Digne-les-bains. Hier, j’ai discuté encore avec ce Guinéen embauché par mon voisin, dans le cadre d’une formation en alternance. Ce migrant vient de loin. Le sourire de son visage disait son bonheur d’une première paie, énorme pour lui ; d’une régularisation administrative ; de pouvoir subvenir enfin à son bien-être et celui des siens restés au pays. D’avoir pu financer la location de son propre logement. J’ai vu aussi la fierté du « patron » de participer à l’accueil de cet « étranger » dont il a pris soin.
Les étrangers n’ont pas la cote en ce moment en France. Nous avons du mal à nous remettre en cause et à voir objectivement la réalité. Non, nous ne sommes pas submergés par les migrants. Toutes les observations et études disent le contraire.
La Cimade (je vous conseil de découvrir régulièrement les « vérités vraies » déclinées sur son site . Elle explique que « l’écrasante majorité des personnes qui migrent le font à l’intérieur de leur propre pays. Le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) estime qu’il y aurait 740 millions de migrants internes dans le monde. Les migrants internationaux représentent eux 200 millions de personnes, soit 3% de la population mondiale.
Parmi les migrants internationaux, seul un tiers s’est déplacé d’un pays en développement vers un pays développé. … En réalité, seules 37 % des migrations dans le monde ont lieu d’un pays en développement vers un pays développé. 60% des migrants se déplacent entre pays développés ou entre pays en développement.
Par ailleurs, 7% des migrants dans le monde (soit 15 millions de personnes) sont des réfugiés, la plupart vivant à proximité du pays qu’ils ont fui. Les principales régions d’origine des réfugiés ont aussi été les régions d’accueil de 75 à 93 % des réfugiés. En outre, on estime que 50 millions de personnes étaient des réfugiés environnementaux en 2010 et que 200 millions le seront d’ici 2050…. »
En France, selon le journal La Croix, de source Insee, sur les 67,6 millions de résidents en France, 5,2 millions sont étrangers, soit 7,7 %. Parmi eux, 800 000 sont nés en France. La population d’étrangers nés à l’étranger est donc de 4,5 millions, soit 6,6 % du total. La population immigrée représente 7,7 millions de personnes. Elle se répartit entre, d’une part, les étrangers immigrés (5,2 millions, soit 7,7 % de la population française) et, d’autre part, les immigrés naturalisés français (2,5 millions, soit 3,7 %). Un sur trois a connu l’enseignement supérieur.
Le taux d’immigration en France s’établit à 0,4 %. Proportionnellement à sa population, la France accueille ainsi deux fois moins d’immigrés que l’Allemagne, la Belgique ou les Pays-Bas, et trois fois moins que la Suède ou l’Autriche. Elle se trouve donc au bas du classement des pays d’Europe occidentale.
Les valeurs humanitaires sont simples : celles des gens de la mer (secourir des bateaux en péril et leur occupants en détresse) comme celle de la République (liberté, égalité, fraternité), comme celle des croyants chrétiens (amour et justice vis-à-vis d’un étranger) et celles, fondamentales, de tout Humanité qui nous dit par delà les siècles et les mers que nous avons le même sang qui coulent dans nos veines.
Combien ainsi font le travail que les Français ne veulent plus faire ? Dans le bâtiment, dans les hôpitaux, dans les services publics, dans les métiers peu reluisants comme pour les éboueurs, les égoutiers. Que serait notre pays sans ces travailleurs de l’ombre dont beaucoup sont exploités, manipulés ? Qui s’interroge sur les responsabilités des pays occidentaux qui mettent à sac les richesses des pays d’Afrique ? Politiques, administrations, économies sont sans humanité. Aucun problèmes pour aller voler et piller chez eux leurs richesses, mais beaucoup d’animosité et de haine quand quelques uns viennent « chez nous » pour survivre… Et que dire des fakes news sur les étrangers accueillis : « Les migrants toucheraient plus que les travailleurs pauvres », « les migrants sont mieux traités que les SDF français ». Deux formules qui reviennent inlassablement depuis maintenant plusieurs mois sur les réseaux sociaux. Sauf qu’elles se basent sont des chiffres complétement faux. (voir ici).
Apprenons à vivre ensemble. Nous avons besoin les uns des autres. Et, comme l’écrivait St Exupéry : « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis. »
Je suis pour trois semaines en cure thermale à Digne les bains. Un accident s’est déclaré avec une double fuite de chlore et d’acide. (voir article de presse ici) Je relate ici mes impressions lors de ce vécu particulier :
Ce samedi 10 juin, je faisais partie des personnes victimes d’inhalation de chlore et d’acide aux thermes de Digne les Bains. J’ai vécu une expérience de l’intérieur que je vous partage :
Le « Plan Blanc » a été déclenché avec célérité et je voudrais ici saluer les professionnels qui se sont mobilisés.
Mon expérience de vie, mes formations professionnelles, mes recherches sur le plan humain et spirituel m’ont amené à des convictions qui me font dire que le fond de l’homme est essentiellement positif. En affirmant cela, je me rends compte que je me mets en porte-à-faux avec la tradition religieuse chrétienne qui, depuis St Augustin au IVème siècle, a posé le fondement de la vie chrétienne disant que l’homme naît pécheur.
C’est à partir de ses frasques d’adolescence et de jeunesse (vol de poires en bande, par esprit de transgression et par « simple plaisir de faire ce qui était défendu », passions amoureuses et sexuelles effrénées (« Ce qui surtout me tenait prisonnier et me tourmentait violemment, c’était l’habitude d’assouvir une insatiable concupiscence ») qu’il élaborera, après sa conversion, la doctrine du péché originel. On lui attribuera la détestation du corps, le rejet de la sexualité et du plaisir. Il avait une énergie débordante et un « détail » de sa vie (qu’il rapportera) sera pour lui révélateur : en pleine adolescence, Augustin se faire surprendre par une érection aux Thermes de sa ville de Thagaste . Et l’embarras fut grand quand son père Patricius, « ravi de vanter la vigueur toute romaine de son fils, s’empressa de raconter l’épisode à sa femme Monique, chrétienne fervente, qui, elle, se montra horrifiée. » Ce fut pour Augustin une expérience importante que cette prise de conscience adolescente des caprices du corps et de la découverte du désir et de la honte.
Dans sa lettre du 27 mai 20123, Patrick Le Hyaric, député européen et directeur du journal L’Humanité, invite à changer de logiciel quant à notre perception et à celle des dirigeants du Monde pour repenser la manière des hommes de combattre les idées reçues. Il est pourtant plus facile semble-t-il de lutter pour la Paix que de fourbir ses armes pour détruire le frère.
« De nouveaux mots aux odeurs de poudre et de mort sont de plus en plus prononcés par le président de la République et plusieurs gouvernements occidentaux : « Économie de guerre », « nous sommes en guerre » a récemment déclaré M. Macron avant d’en appeler à préparer « une guerre d’avance ».
Fou qui banaliserait ces mots qui sifflent comme des missiles. Ils ne racontent pas une fiction, mais témoignent de l’ambiance aride qui règne dans les chancelleries dans le monde. Nous venons de basculer dans une nouvelle période inquiétante, dangereuse, où les puissants de ce monde palabrent sur l’arme atomique comme d’un jouet dont ils peuvent se servir.
Une belle figure vient de s’éteindre ce jour, à l’âge de 95 ans. Belle figure d’une personne qui savait, comme beaucoup, il y a des décennies, suivre les intuitions qui montaient dans leur cœur. Quitte à susciter des incompréhensions et des rejets. Ils allaient leur chemin, le créaient parfois, au pas à pas de ce qu’ils recevaient à l’intime.
Pendant 10 ans j’ai côtoyé René Pinsard au cœur de Pigalle.
Je constate, dans mon petit quartier, que l’attention que je porte à mes voisins et voisines, (pour démêler des affaires administratives, résoudre des problèmes informatiques, vraiment accueillir un témoin de Jéhovah malgré mes réticences, se soucier des enfants…) favorise un climat de confiance relationnelle, de présence mutuelle heureuse. La Paix dans le Monde débute sans doute par celle de notre cœur et celle dans nos voisinages. La solidarité avec les tout proches n’est-elle pas le chemin de la paix dans le Monde ? Je viens de travailler avec Adhémar, mon voisin lycéen de 17 ans.Passionné par la vie politique, l’histoire grecque, élu délégué de classe et du conseil d’administration du lycée Pierre Gilles de Gênes.
Il s’était inscrit à un concours organisé par le Ministère des Armées « Les jeunes pour la paix ». Ceux-ci sont invités à « acquérir des connaissances historiques sur la Grande Guerre dans leur région, et à approfondir les notions de guerre et paix en les reliant au monde d’aujourd’hui ».
Adhémar a choisi de faire un plaidoyer pendant que d’autres écrivaient un poème ou s’investissaient dans le dessin ou la peinture. Il est passé me demander conseil après son travail écrit. Nous avons travaillé ensemble, mis en forme son texte et poser les conditions d’une bonne élocution pendant quelques heures.Avec son autorisation, voici le contenu de son travail qu’il a lu devant un aréopage composé de collègues de classe et de représentants de la ville (maire) et du département (conseillers départementaux) et de la nation (préfets et sénateurs), de l’armée, dans une épreuve éliminatoire. Il a obtenu un diplôme dont il est fier aujourd’huiet n’a fait que renforcer son aspiration à une vie politique qui soit de service.
Sur sa page Facebook, mon ami Jean Lavoué invite à participer à un projet initié par Yin Xiaoyuan sur le thème « une photo de soi enfant, un poème » ! Il a lui-même répondu à l’invitation et écrit son poème. Bien que je ne sache pas comment y participer, voici ce qui m’est venu. Car je n’ai pu résister à cette proposition !
Je suis là, assis sur le seuil, ni dedans, ni dehors, Et pourtant ouvert sur le monde, tournant le dos au nid sécure.
Je suis là, confiant, en la magie de cet œil qui imprime son image dans la pellicule et, derrière l’appareil, regard de mon père ? De ma mère ? Aujourd’hui, je me reçois d’eux.
Beaucoup de tristesse à l’annonce du décès de Jacques Gaillot. Certains l’appelaient « l’évêque des autres », d’autres « l’évêque des pauvres ». Sur les réseaux sociaux le mot « contestataire » revient régulièrement. Il a eu droit à des éloges appuyés de la part de ceux qui ont pris le parti des pauvres, des migrants, des méprisés, des exclus (voir les journaux Libération, l’Humanité…). Par contre, La Conférence des évêques de France (CEF) s’est fendu d’un bref communiqué de 5 lignes disant que ses membres « au delà de certaines prises de position qui ont pu diviser, nous nous rappelons qu’il a surtout gardé le souci des plus pauvres et des périphéries. » Langue de buis dans toute sa splendeur !
En réaction à un article de Pierre Castaner intitulé « Béatitudes d’un bon catho qui ne veut rien changer » sur le site « Garrigues et sentiers » (dossier « rester dans l’Église catholique »), je me permets la poursuite du dialogue en réfléchissant sur la nécessité d’un regard de compassion le plus ouvert possible sur la vie du Monde et des Églises, celle catholique en particulier :
Nous pourrions aussi exprimer le texte de Pierre Castaner autrement. Il dirait alors toute la compassion pour celui ou celle qui se sent à l’étroit dans l’institution et pour cette institution elle-même qui a tant besoin de miséricorde pour pouvoir remplir sa mission… Ainsi :
« Oh ! qu’il est malheureux d’être dans une Église faite que d’hommes où la femme est exclue des décisions. Oh ! qu’il est malheureux d’être dans une Église totalitaire avec un pape monarque absolu, des évêques grands Seigneurs et des curés patrons qui décident de tout. », etc.